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Les souvenirs sont ceux qui affluent au cerveau quand vous vous réveillez d'un sommeil profond puis d'une léthargie appelée: post-coma.
Les questions envahissent votre esprit parce que où êtes-vous?

Je ne savais plus et vous êtes comme perdue.

Voici mes premiers souvenirs que j'avais griffonnés (illisibles) sur un bloc, quelques jours après mon propre réveil, le réel :

"Je voudrais écrire mais je ne sais par où commencer, est-ce une biographie, un journal, une histoire, un documentaire… Je n’en sais rien, je voudrais juste raconter un moment de ma vie qui est en fait une expérience avec tous les soucis et les changements que cela a impliqué…

Vous comprenez je me suis réveillée un jour de semaine dans une chambre visiblement, il y avait trois lits d’un côté et trois de l’autre, un hôpital ou un hospice,…que dire ?

            C’était un bruit de radio avec Zazie qui chantait une nouveauté que je ne connaissais pas, moi pourtant toujours à l’affût de ses chansons à texte.

J’ai regardé encore autour de moi, ce ronchonnement qui ressemblait plus à un crachouillis permanent comme quelqu’un qui veut cracher à terre mais qui n’arrive pas à sortir son « mollard » c’était un bruit dégoûtant, répugnant…..

Mais où étais-je ? Un peu plus loin c’était une autre femme qui semblait dormir avec des appareils autour, face à moi des placards où il était écrit quelque chose mais je ne voyais pas d’ailleurs où étaient mes lunettes ?

Je voulais descendre, me lever mais il y avait des barreaux à mon lit, un cauchemar, que m’arrivait-il ? Ma table de chevet visiblement il y avait des dessins d’enfants mais pas de lunettes.

            Je regardais autour de moi encore et encore, tout se bousculait dans ma tête « où était Lola ? Les garçons ? »

            Il n’y avait aucune tête connue autour de moi, j’ai eu soudain très peur, une peur qui prend au ventre à vous tordre de douleur, mais visiblement mon corps était habituée à la douleur car ce n’était pas la sensation habituelle de mes peurs. Soudain, une jeune femme posa un bol de café devant moi sur la table à roulettes « excusez moi, je n’aime pas le café ! » elle me regarda avec un air… quand j’y repense, ça me fait froid dans le dos du manque de tact du personnel hospitalier… « Oh Eve, tu ne vas pas m’emmerder tu vas avaler ton p’tit dej ! Tous les matins tu bois ton café, c’est bon tu vas pas nous faire chier ce matin on a assez de boulot comme ça. » J’ai insisté, j’ai toujours eu horreur qu’on me parle comme si j’étais la dernière des merdes.

Je l’ai entendu rouspéter après moi comme si j’étais une enfant qui faisait encore un caprice en retournant avec le café, puis une autre m’a demandé ce que je voulais.

J’ai bu mon chocolat, mangé quelques tartines j’avais faim ; je regarde encore et encore avec une foule de questions qui me viennent à l’esprit mais je ne comprends pas et je me sens fatiguée.

« Eve, tu te laves toute seule ce matin ? »

Evidemment !

Hop on me pose une bassine sur la tablette et deux gants tout en me baissant une des barrières de mon lit.

J’ai toujours eu horreur de me laver ainsi, « je ne peux pas prendre une douche ? »  « on est pas vendredi, Eve ! »

Quelle horreur ! Un cauchemar, je vais me réveiller !!!

                  Une jeune femme, celle qui m’avait servi mon chocolat me demanda si j’allais bien, je fis signe de la tête négativement, elle vint vers moi. Après quelques réponses à mes questions elle me dit de ne pas m’inquiéter le médecin allait venir me voir.

Je me rallongeais avec l’envie de fermer les yeux et je sombrais de nouveau dans le sommeil.

            « C’est l’heure de la kiné ! » me dit un petit bout de femme qui me rouvrit le côté de mon lit, tu t’assois ! Est-ce que tu vas avoir la force d’aller jusqu’au fauteuil aujourd’hui ? »

Je me mis sur le bord du lit et voulus me dresser, elle me rattrapa juste avant que je m’éclate à terre, « eh doucement ! Eve tu ne peux pas encore tenir toute seule ça va venir ». Elle m’installa dans le fauteuil roulant et me sangla

Non mais c’était vraiment un cauchemar je ne m’étais pas éveillée "


Et oui, je me suis "r"éveillée; perdue dans ce monde où le réel est irréalité, trop cauchemardesque, dans ce monde protégé d'un hôpital de réadaptation fonctionnelle, où tu passes une heure par jour en kiné, une heure en ergothérapie, une heure par semaine en neuropsy, une en orthophonie... Lamentable!

Quand j'y repense, non c'est très bien puisque je m'en suis "tirée"; certainement grâce à tout ça.

 

Des heures passées seule assise dans mon lit, le week-end, rien, aucune réadaptation, les visites, je n'en avais pas: aucune!

L'abandon.

Ja parlais souvent avec Marie, une maman qui avait tout abandonné pour rester auprès de son fils...

Elle ne comprenait pas, moi non plus d'ailleurs.

 

Je restais là, assise en tailleur avec mes souvenirs qui réapparaîssaient dans un désordre chronologique digne de la nuit des temps. 

(J'adore Barjavel)

Je ne pouvais plus lire, je louchais dès que je regardais une page, sans compter si je regardais la télé.

Heureusement qu'au bout d'un certain temps le neurologue s'en est aperçu, et là une heure en plus par semaine d'orthopsie.

 

Et oui, la semaine passait relativement vite, surtout que je dormais beaucoup et j'étais shootée aux médocs anxiolitiques, antidépresseurs, canaliseurs d'humeur... je devais être une violente!

 

Je repensais à tous mes fous rires avec Sonia, amie de lycée qui m'avait fait devenir bonne élève sans même s'en rendre compte, son sérieux face aux études m'avait contrainte à réfléchir, elle qui était sortie avec mon petit ami quand je travaillais en colo, faut dire qu'elle l'aimait bien plus que moi et qu'elle était timide à l'époque, j'étais donc sortie avec lui avant elle, finalement c'était moi qui n'avais pas été cool sur ce coup là!

On s'était revues quand j'avais accouché d'Edouard mais Thierry n'avait pas vu ça d'un bon oeil!

Gino, connaissance qui fût une révélation sur la nature humaine: les hommes n'étaient pas tous idiots, barbares, arrièrés néanderthaliens.
Je crois qu'il était le brouillon de l'homme que j'aurais aimé épouser mais il fallait le rencontrer! Mon premier Zazie fût lui. Vraiment pas simple!

Sonia et moi, on s'est retrouvées par une connaissance commune et comme j'étais séparée du père des gars, on s'est fait une soirée démente où j'étais rentrée chez moi les vitres ouvertes avec la musique à fond pour ne pas m'endormir. Arrangée!

 

 

    Jean-Philippe, une superbe année de terminal à Péronne où je me suis régalée à faire du théâtre, j'avais le "style"! C'était Queneau.

 

Olivier, deux années, rencontré à l'école d'infirmière où d'ailleurs je n'en avais vraiment pas la carrure, trop sensible et trop émotive pour supporter la douleur chez l'être humain quel qu'il soit.

J'en avais mal aux tripes, au coeur,; CCV (chirurgie cardio-vasculaire) des haut-le-coeurs, à en vomir mes tripes, c'est clair, je n'avais pas la moëlle pour aider les gens physiquement face à leurs douleurs. J'aurais peut-être dû faire infirmière psychiatrique..bien que... Trop dans l'empathie pour survivre.

Je me suis souvent demandée si je n'étais pas folle moi-même.

 

Remarque vu le bassin d'emploi de Berck-sur-Mer j'aurais pu être aide-soignante, elles étaient aussi fines qu'un pachyderme... quand je me souviens comment elles malmenaient les patientes les jours où elles n'étaient pas d'humeur... Elles devaient être réglées.

 

Elles étaient si fortes de leur bonne santé et de leur capacité à être, alors que nous n'étions plus rien, une ombre de ce qui avait dû être une personne.

 

Une honte!

 

Biensûr, elles n'étaient pas toutes comme ça, mais la majorité.

 

Nicole, ma voisine de chambre quand je me suis retrouvée en chambre pour deux, était si souvent traitée comme une vieille emmerdeuse parce qu'elle n'arrivait à rien faire toute seule, son téléphone sonnait, jamais une personne ne déccrochait pour elle, elle avait beau appelé, rien, on entendait "c'est la vioque qui y va?" et personne ne se dépêchait. C'est ainsi que je lui ai tenu son téléphone.

 

Et c'est ainsi que j'ai rencontré l'homme le plus époustouflant qui soit.

 

Et Céline, avec laquelle j'avais passée le plus clair de mon temps de week-end de célibataire quand Edouard et Richard allaient chez leur papa; elle qui m'avait tant dit de me méfier d'un homme qui ne dit rien et qui en a une autre...

 Quelle honte,et moi, en fait, ça devait bien m'arranger, je haïssais les hommes et leur nature égoïste; mais ne pouvais me contraindre à me passer d'un objet différent sexuellement, et ne pouvais me résoudre à chercher, essayer, changer tout le temps, un unique là de temps en temps sérieux d'une certaine façon qui ne farfouillait pas dans mes affaires: impeccable!

Je n'aimais pas les hommes, un vieux contentieux,... je suppute, enfin je me doute... en fait, non je sais.

 

C'est ainsi que Jacques est devenu avant l'amour mon meilleur ami, mon confident, une écoute pleine de réconfort et de pensées positives pour tirer le meilleur de chaque chose. Il a été la démonstration que je pouvais encore faire confiance à l'amour d'un homme mais il a été d'abord et toujours mon ami qui me permettra toujours d'avoir confiance en lui et de tout lui dire.

 

Frédérique, aussi, mère attentive où je passais les week-ends quand j'avais les gars... Son homme partait en virée tous les vendredis soirs et on se fumait des plantes vertes en refaisant le monde sans hommes:

     Tous des balourds!!!

Mais dont on ne pouvait se passer!

 L'être humain toujours en quête d'amour...

 

Vivre seul oui, sans enfants, ça non, je ne pouvais pas!

 

Jacques, la plus belle compréhension de la femme, ma plus grande révélation, mon unique révélation, après une idée qui avait germée grâce à Gino (très bel amour platonique qui a marqué ma vie à jamais) que les hommes sont "bien", et qui le restera toujours au fil de mes vies...

 

Et aujourd'hui, vivre sans lui est une impossibilité technique, je ne pourrais même plus respirer...

 Jacques est l'amour même, et lorsqu'il est absent, je ne fais que survivre.

J'ai souvent l'impression que je ne pourrai plus jamais aimer car l'attrait de la passion est beaucoup moins attirant que la force du temps de la complicité.

                                       

                                                Mamève

PS: et bien, huit ans après avoir écrit ceci, je me suis encore trompée.

 

 

                 

 

 

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